lundi 6 juin 2016

Le sens du travail (fin : questions/réponses)

Questions/réponses
Comment, par l’application d’une norme, peut-on garder sa liberté de créer ? Comment peut-on être chrétien quand on produit de la norme ? Réponse : il ne faut pas oublier la finalité de la règle ou de la norme : c’est de mieux travailler. Cela suppose que les gens aient une conscience de ce que c’est que le travail qu’il y aura derrière l’application de la norme. Ensuite, il faut éviter le rêve techniciste : l’outil ne suffit pas, la norme ne suffit pas. Humilité, éviter le délire de toute-puissance. Il y a du local qui échappe à la norme, il y a une qualité du collectif, du management, qui demande des marges de manœuvres que les outils ne permettent plus. Une règle est copiable, et d’ailleurs les entreprises ont toutes les mêmes, ISO, etc… ; ce sont les gens qui font la différence.
CFTC  (Bry) Comment faire pour que la digitalisation puisse être une occasion d’un mieux ? Les entreprises parlent bcp de virage numérique. Réponse : Digitalisation = mot d’ordre permettant de préparer les troupes aux changements fondamentaux. C’est une excuse. Leur objectif est en réalité de faire passer autre chose : la culture du changement permanent, de l’instabilité, de la précarisation. Ensuite, elle permet de s’offrir un discours à moindre coût de l’éclatement du travail : flexdesk, co-working, télétravail….Objectif = économies de m² ; démagogie sur le télétravail : les gens en veulent sans en avoir évalué les impacts de fond. Ils rêvent. Quel est le monde que cela nous prépare ? Le 2.0 contribue à une société sans Auteur, particulièrement pénible en France où on aime les têtes pensantes, et là, il n’y en a plus. On nous dit que c’est inéluctable, c’est le sens de l’histoire, on n’arrêtera pas la locomotive. Le libéralisme ravale le marxisme. On a le devoir de résister, de dire non, de rester capable d’agir. Avec ces outils, on construit la prophétie des années 70 : « Le monde où tout sera permis et rien de sera possible ». Cela date des années 70. Les chrétiens, les personnes non résignées ont pour mission de s’opposer à ceux qui veulent déconstruire la souveraineté de l’homme, individuelle et collective, sur le travail et ses conditions de son exercice. Dire que c’est irréversible, c’est un affaissement de la souveraineté indigne de l’homme. « Un homme en bonne santé est celui qui peut agir sur son environnement »

Question du lean : industrie, management, administration : le lean redonne du pouvoir aux acteurs pour faire évoluer leurs process. A contrario, l’Agilité prône la co-création, collaboration mieux que des tableaux de bord : ce sont 2 courants à contre-sens l’un de l’autre. Troisième courant : l’entreprise libérée. Réponse : il y a très loin entre l’idée d’origine du lean par le japonais Ono, et leurs applications chez nous. On fait du lean, on ne fait pas du management. On fait du maigre, de l’optimisation de process, mais pas du management.
On ne peut pas sortir de 70 ans de fordo-taylorisme pour entrer directement dans la subsidiarité. L’autonomie demande plus de chefs parce qu’il y a plus de marges. Le libéralisme à fond revendique la société de l’autonomie, mais en réalité, on a besoin d’autorité : le manager ne doit pas se retirer, il doit être auteur pour faire grandir.
« Il faut libérer l’entreprise », disent les chefs d’entreprise : c’est une belle autocritique ! Autonomie = je me donne mes propres règles ; absurde quand le lieu du travail est celui de la communauté. Les chefs qui ne sont plus jamais-là ne connaissent plus nos problèmes, ne peuvent plus rien pour nous : la suppression des chefs est une catastrophe. Pourtant, il y a un courant de consultants qui prône cela….c’est une erreur.
Disparition de l’humanisme intégral : Réponse : nous avons renoncé à pouvoir dire ce qui est bon pour l’homme, parce qu’on est convaincu que le « bon pour l’homme » ne peut plus être dit. Il nous manque donc un critère de discernement. Remplacé par le critère de « génération de profit » pécuniaire ou de croissance financière. Le juge de paix n’est plus le bon, le beau, mais le profitable.
Ce mal-être au travail est-il spécifiquement français ? Non, les US l’ont vécu avant nous. On n’a pas fait de RETEX des années 90 aux US. On s’exagère beaucoup trop le mirage américain. Il y a beaucoup de dégâts, et là-bas, ils le savent.
Les penseurs du 18ème ont pensé une société de liens sociaux, alternative à l’ancienne culture fondée sur le bien commun et l’Histoire (j’ajoute : le sang), en prenant l’économie comme ciment : Rousseau = Le contrat social. Ce projet -là a désormais des armes incroyablement puissantes servies par la technique, mais incapables de créer du bonheur.

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