lundi 1 août 2016

Augmentation du temps de travail : clés de discernement.


Faut-il adhérer à l’accord d’augmentation provisoire du temps de travail chez AIRBUS DS et AIRBUS Defence and Space ?


On peut envisager les choses sous deux angles : l’angle individuel et l’angle collectif.

D’un point de vue personnel, le dispositive négocié ne comporte que des avantages, pour qui est concerné par la surcharge de travail : un paiement à 110% + des chèques CESU pour payer la nounou ou le centre aéré pendant qu’on travaille 6 jours de plus ; ou encore des chèques transport d’un même montant. Comme de toutes façons, les salariés dans ce genre de situation ne prenaient pas tous leurs jours de RTT, le dispositif proposé ne fait qu'entériner un état de fait.

Si l’on regarde le problème sous un angle collectif, il faut comprendre pourquoi l’entreprise veut nous faire travailler plus. Il y a certainement un affichage politique, voire stratégique, sur le « 218 jours ». Mais il y pragmatiquement une autre raison : la difficulté d’embaucher, parce que les jeunes diplômés ne sont plus attirés par la grosse industrie :

  • Salaires d’embauches impossibles à aligner sur ceux des banques ou des métiers de la finance,
  • volonté d’émancipation des jeunes générations plus tentés par des entreprises de service offrant de multiples opportunités, par le « free lance », l’auto-entrepreneuriat
  • attractivité de l’expérience à l’étranger, etc.

"Le plus simple est de faire travailler encore plus la ressource déjà disponible."

Et puis, les cycles ont leurs hauts et leurs bas, alors que les contrats de travails sont un engagement de très long terme pour un entrepreneur. Plutôt que de faire du personnel une variable d’ajustement avec des licenciements, c’est le temps de travail de ce personnel qui est la variable d’ajustement, mais au détriment de la santé des inscrits lorsque l’environnement est pathogène, et au détriment et des hypothétiques candidats à l’embauche, qu’on ne trouve d’ailleurs qu’avec difficulté.
Enfin, adhérer au principe, c'est (sauf mention de réserves) se priver d'une parole contestant l'augmentation du temps de travail, de pression, de risque psycho-sociaux, c'est être définitivement en contradiction avec d'autres paradigmes économiques (voir Larouturou).

La conclusion n’est donc pas simple. la CFTC a propose comme alternative à Airbus Defence and Space :

- de redevenir attractif avec des salaires compétitifs pour le marché de l’emploi des diplômés, ce qui plairait aux syndicats "de gauche"

- d’être hyper réactifs dans notre administration, ce qui plairait à Tom-Chef-Enders.

- d’avoir des structures de décision légères et beaucoup de délégation des responsabilités, ce qui plairait à tout le monde à commencer par les manager du "change culture".

- d’avoir une Gestion des emplois et compétences  (GPEC) qui soit très fluide, ouverte sur le monde extérieur, qui propose à chacun et très vite des expériences à l’étranger, des expériences d’encadrement, ce qui plairait à la CFTC.

En attendant que cette nouvelle culture d’entreprise se mette en place, si elle le peut dans le Groupe AIRBUS, chacun se déterminera en fonction de ses besoins individuels (qui poussent à dire « oui » à la proposition) et de ses valeurs collectives et sociétales, lesquelles  peuvent pousser à dire « non » pour induire un changement plus nécessaire et plus rapide de culture de management dans l’entreprise AIRBUS Defence and Space.
Clé de discernement : selon quelle decision le monde de demain sera-t-il meilleur?

2 commentaires:

  1. Vu de l’intérieur (ou vu du terrain), l’analyse la plus courante consiste à dire que :
    - Passer à 218 jours représente 2.8% d’augmentation de temps de travail ; avec un taux de réponse positive de 80%, cela fait un accroissement de 2.26% de la capacité
    - Or les besoins ne sont pas de l’ordre de quelques %, mais de plusieurs dizaines de pourcent (on a un quasi doublement des effectifs par les AT actuellement) : on est donc dans le symbole
    - Les statistiques montrent que la moyenne des jours de congés non pris est de l’ordre de 6 : on ne fait donc qu’entériner un état de fait, qui plus est avec un cadeau au passage

    La question que se posent les salariés est dans le meilleur des cas « quelle est la stratégie cachée derrière cette proposition », ou dans le pire des cas « sont-ils incompétents à ce point-là (proposer de travailler plus, au sortir d’un PSE aberrant au vu des plans de charges connus lors de son lancement) ».

    En prenant du recul, la véritable question reste comment motiver les personnes. En effet, 2.8% d’augmentation de temps de travail représente à peine plus d’une heure par semaine. Un peu de flottement dans les motivations, et ce gain de disponibilité est plus que largement perdu dans l’efficacité.
    La recommandation la plus importante que nous puissions faire passer à la direction, est le besoin de recréer de la confiance et de la transparence dans les décisions, par le biais notamment d’un véritable partage et dialogue avec les salariés.

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    1. La CFTC avait demandé en préalable que le temps de travail des cares soit mesuré de façon plus fine qu'en jours, afin que l'on puisse mesurer la réalité économique d'une telle mesure. En vain, évidemment !

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