Questions/réponses
Comment, par l’application d’une
norme, peut-on garder sa liberté de créer ? Comment peut-on être chrétien quand on produit de la norme ?
Réponse : il ne faut pas oublier la finalité de la
règle ou de la norme : c’est de mieux travailler. Cela
suppose que les gens aient une conscience de ce que c’est que le
travail qu’il y aura derrière l’application de la norme.
Ensuite, il faut éviter le rêve techniciste : l’outil ne
suffit pas, la norme ne suffit pas. Humilité, éviter le délire de
toute-puissance. Il y a du local qui échappe à la norme, il y a une
qualité du collectif, du management, qui demande des marges de
manœuvres que les outils ne permettent plus. Une règle est
copiable, et d’ailleurs les entreprises ont toutes les mêmes, ISO,
etc… ; ce sont les gens qui font la différence.
CFTC (Bry) Comment faire pour
que la digitalisation puisse être une occasion d’un mieux ?
Les entreprises parlent bcp de virage numérique. Réponse :
Digitalisation = mot d’ordre permettant de préparer les troupes
aux changements fondamentaux. C’est une excuse. Leur objectif est
en réalité de faire passer autre chose : la culture du
changement permanent, de l’instabilité, de la précarisation.
Ensuite, elle permet de s’offrir un discours à moindre coût de
l’éclatement du travail : flexdesk, co-working,
télétravail….Objectif = économies de m² ; démagogie sur
le télétravail : les gens en veulent sans en avoir évalué
les impacts de fond. Ils rêvent. Quel est le monde que cela nous
prépare ? Le 2.0 contribue à une société sans Auteur,
particulièrement pénible en France où on aime les têtes
pensantes, et là, il n’y en a plus. On nous dit que c’est
inéluctable, c’est le sens de l’histoire, on n’arrêtera pas
la locomotive. Le libéralisme ravale le marxisme. On a le devoir de
résister, de dire non, de rester capable d’agir. Avec ces outils,
on construit la prophétie des années 70 : « Le monde où
tout sera permis et rien de sera possible ». Cela date des
années 70. Les chrétiens, les personnes non résignées ont pour
mission de s’opposer à ceux qui veulent déconstruire la
souveraineté de l’homme, individuelle et collective, sur le
travail et ses conditions de son exercice. Dire que c’est
irréversible, c’est un affaissement de la souveraineté indigne de
l’homme. « Un homme en bonne santé est celui qui peut agir
sur son environnement »
Question du lean :
industrie, management, administration : le lean redonne du
pouvoir aux acteurs pour faire évoluer leurs process. A contrario,
l’Agilité prône la co-création, collaboration mieux que des
tableaux de bord : ce sont 2 courants à contre-sens l’un de
l’autre. Troisième courant : l’entreprise libérée.
Réponse : il y
a très loin entre l’idée d’origine du lean par le japonais Ono,
et leurs applications chez nous. On fait du lean, on ne fait pas du
management. On fait du maigre, de l’optimisation de process, mais
pas du management.
On ne peut pas sortir de 70 ans de
fordo-taylorisme pour entrer directement dans la subsidiarité.
L’autonomie demande plus de chefs parce qu’il y a plus de marges.
Le libéralisme à fond revendique la société de l’autonomie,
mais en réalité, on a besoin d’autorité : le manager ne
doit pas se retirer, il doit être auteur pour faire grandir.
« Il faut libérer
l’entreprise », disent les chefs d’entreprise : c’est
une belle autocritique ! Autonomie = je me donne mes propres
règles ; absurde quand le lieu du travail est celui de la
communauté. Les chefs qui ne sont plus jamais-là ne connaissent
plus nos problèmes, ne peuvent plus rien pour nous : la
suppression des chefs est une catastrophe. Pourtant, il y a un
courant de consultants qui prône cela….c’est une erreur.
Disparition de l’humanisme
intégral : Réponse :
nous avons renoncé à pouvoir dire ce qui est bon pour l’homme,
parce qu’on est convaincu que le « bon pour l’homme »
ne peut plus être dit. Il nous manque donc un critère de
discernement. Remplacé par le critère de « génération de
profit » pécuniaire ou de croissance financière. Le juge
de paix n’est plus le bon, le beau, mais le profitable.
Ce mal-être au travail est-il
spécifiquement français ? Non, les US l’ont vécu avant
nous. On n’a pas fait de RETEX des années 90 aux US. On s’exagère
beaucoup trop le mirage américain. Il y a beaucoup de dégâts, et
là-bas, ils le savent.
Les penseurs du
18ème ont pensé une société de liens sociaux,
alternative à l’ancienne culture fondée sur le bien commun et
l’Histoire (j’ajoute : le sang), en prenant l’économie
comme ciment : Rousseau = Le contrat social. Ce projet -là a
désormais des armes incroyablement puissantes servies par la
technique, mais incapables de créer du bonheur.
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