Le marché n’a pas de morale,
ou l’impossible société marchande. Conférence donnée à Triel sous l'égide de l'Association familiale catholique et de la paroisse de Triel.
Avertissement : Ces notes
prises à la volée et légèrement remises en forme n’engagent pas
le conférencier : elles sont ce que le transcripteur en a
perçu, avec ses propres résonnances liées à son expérience
familiale, professionnelle et syndicale. Elles sont proposées à
toutes les personnes que ce sujet intéresse pour être une base de
réflexion mais non un enseignement « ex cathedra »
faisant autorité. Hervé Bry, pour la CFTC des Yvelines.
Introduction par le Père Matthieu Berger, curé de Triel, qui témoigne d'une augmentation de la souffrance de ses paroissiens au sujet du travail.
Matthieu Deschessahar : Quiconque est préoccupé par la
défense de la vie s’intéresse à la question du travail. On y
passe beaucoup de temps : 50% de notre temps de vie éveillée.
Si le travail n’est pas un lieu de vie, cela reviendrait à dire
qu’on vivrait à mi-temps. Trouver du sens au travail est une
question essentielle dans la vie. L’intuition pastorale du curé
est sombre : souffrance, les paroissiens témoignent.
Double interrogation sur le travail :
la question d’en avoir ou pas (le chômage), qui est la question de
l’emploi, très présente dans le débat politique. On ne va pas la
traiter ce soir. L’autre interrogation est absente du débat
politique mais très présente dans l’entreprise : c’est la
question posée par ceux qui ont du travail : le problème qui
se pose est alors celui de la qualité du travail. Plus qu’avant,
ils se posent des questions. Cela fait plus de 15 ans que les
plaintes en provenance de ceux qui ont du travail augmentent.
Souffrance, stress, burn-out, Risques psychosociaux. Si on parle de
retrouver de la qualité de vie, de bien-être, c’est parce qu’on
n’y est pas. Quel directeur a ces thématiques en priorité ?
Peu, pas.
En amont, on a un diagnostic d’une
gigantesque plainte des cadres et non cadres, qui disent que « le
travail n’a plus de sens ». « Je me demande ce que je
fais ici, on tourne en rond, on fait rien de bon », etc…. Ce
mot de perte de sens fait partie désormais du vocabulaire de
l’entreprise. Ceux qui dénoncent cette perte de sens se retrouvent
devant un choix, deux possibilités : je reste parce que je
suis coincé (famille, marché de l’emploi, etc…), mais alors je
ne viens travailler qu’avec le petit sens du travail :
gagner quelques sous (Simone Weil). Et il y a ceux qui ont le courage
de déserter, surtout la grande entreprise, pour s’installer en
province, développer un petit business à eux, quitte à perdre 60%
de leur salaire, parce qu’ils ne peuvent pas envisager 30 ans dans
ces conditions. Heureux de repartir, « même profs »,
asso sociale, paysagiste.
Cette perte de sens est problématique :
on en fait des maladies si on n’a pas des sources d’équilibre
ailleurs. Elle est pathogène pour soi et pour l’entreprise
elle-même : déficit de contribution, comportement de repli,
travail a minima, pas plus : c’est une catastrophe dans les
entreprises. Cela se voit et du coup, les entreprises mesurent
l’engagement de leurs salariés : c’est la chute libre.
Enquête Gallup sur les entreprises françaises en 2015 : 10%
des salariés sont engagés, pro-actifs. 60% sont désengagés :
le minimum sans entrain, ceux qui viennent pour partir. 30% sont
activement désengagés : des saboteurs. Même les directions
sont atteintes par la perte de sens. Les managers aussi. Les managers
sont sensés être des donneurs de sens, mais ce sont les premiers
touchés.
Qu’est-ce qui se passe ?
L’exposé est articulé en 2 parties, suivies de questions/réponses :
1ère partie : Si on
veut essayer de comprendre, il faut se rappeler le fait que :
c’est quoi, le sens du travail, pourquoi je travaille ? Ce
n’est plus aussi évident qu’avant. « Je ne taille pas une
pierre, je construis une cathédrale », cela ne marche plus
vraiment. Le collectif a perdu toute consistance.
2ème partie :
aujourd’hui, quelles sont les choses qui sont susceptibles de
porter atteinte au sens ?
A suivre dans les billets de blog suivants.
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